Diagnostic

Diagnostic du vivant de l'animal

Les outils développés et leur utilisation dans le cadre du diagnostic et du dépistage de la tuberculose doivent répondre au constat essentiel :

  • que l'infection tuberculeuse reste très longtemps asymptomatique ;

  • et qu'une telle infection est très dangereuse car elle facilite la diffusion à bas bruit de bacilles tuberculeux.

Le dépistage revêt donc dans ce contexte une importance considérable.

Si vous souhaitez approfondir la notion de diagnostic et de dépistage et les différences entre ces deux notions dans le contexte de la tuberculose animale, il vous suffit de cliquer sur ce lien pour accéder à un exercice qui vous aidera à éclaircir les points encore obscurs.

I ) La tuberculination (test in vivo)

Il s'agit de mettre en évidence une réponse allergique (HSR) chez un bovin sensibilisé par des mycobactéries MTCB.

On utilise pour cela de la tuberculine, issue de protéines bactériennes purifiées (cf. infra).

On distingue l'Intradermo-tuberculination simple (IDS) qui vise à mettre en évidence une infection par M. bovis, et l'intradermo-tuberculination comparative, qui aide à différencier une infection par M. bovis d'une infection par d'autres mycobactéries.

A) L'intradermo-tuberculination simple (IDS)
Un protocole réglementé

Les IDS et les IDC doivent être réalisées par un vétérinaire sanitaire selon un protocole strictement réglementé (cf. infra), et ce d'autant plus que la lecture n'est pas automatisable. Il en résulte que tous les facteurs permettant de réduire le niveau d'erreur, de biais ou d'incertitude au niveau de la réalisation technique et de la lecture ont été pris en compte, du moins en théorie.

Il appartient à l'éleveur de mettre à disposition un matériel de contention adapté (cornadis, couloir, cage de contention...).

Il est obligatoire de marquer le point d'injection, préférentiellement par tonte des poils ou coupe des poils aux ciseaux.

La mesure du pli de peau est également obligatoire. Elle est faite au moyen d'un cutimètre homologué. Malgré l'usage de cet outil, la mesure peut varier en fonction de la position du cutimètre : Le vétérinaire doit standardiser sa pratique sur un même animal en début d'opération en répétant la mesure un certain nombre de fois jusqu’à ce que la mesure ne soit plus variable.

La seringue utilisée doit également être homologuée. Il existe essentiellement deux modèles : Mc Lintock et Muto. La SNGTV a réalisé une vidéo de présentation de la première.

La pénétration de la totalité de la dose de tuberculine et son injection strictement intradermique sont fondamentales.

Aucune évasion ou rejet de liquide, même minime, ne doit se produire.

La vérification de la présence d’une papule intradermique après injection est indispensable et si l’injection n’est pas satisfaisante elle doit être recommencée, éventuellement sur un autre site

Lecture des résultats

La lecture du résultat se fait 72 heures après l'injection, par comparaison des mesures initiales et finale de l'épaisseur du pli de peau.

On appelle 𝚫 la différence entre l'épaisseur initiale et l'épaisseur finale

\(𝚫 = Épaisseur finale - épaisseur\  initiale\)

 Pour un animal, si :

  • 𝚫 est inférieur à 2mm : le résultat est considéré comme négatif

  • 𝚫 est supérieur à 4mm : le résultat est positif

  • 𝚫 est compris entre 2 et 4 mm : le résultat est douteux.

En ce qui concerne le statut du troupeau :

Si un résultat au moins est non négatif (i.e. positif ou douteux), le troupeau est considérée comme suspect.

AttentionUne limite de l'IDS

Les vaches infectées par des mycobactéries atypiques (complexe MAC ou « M. avium-intracellulare ») peuvent aussi réagir à la PPD-B car les bactéries MTBC partagent des antigènes avec les MAC (qu'il s'agisse de mycobactéries de l'environnement, de souches de « M. avium » pathogènes pour les poules ou de « M. avium sbsp. paratuberculosis », l'agent de la paratuberculose des ruminants).

Dans ce cas-là, on obtient des résultats non-négatifs qui perturbent la définition du statut de l'élevage. L'utilisation de l'IDC permet de préciser les choses.

B) Intradermo-tuberculination comparative (IDC)

Elle consiste à injecter non seulement de la PPD-B, mais aussi de la PPD-A, une PPD issue de M. avium, en partant du principe que la réaction immunitaire homologue est plus forte que la réaction hétérologue. En d'autres termes, en cas d'IDC, une vache infectée par M. bovis sera supposée réagir davantage à la PPD-B qu'à la PPD-A et inversement pour une vache infectée par une bactérie MAC.

La lecture des résultats

Au niveau Individuel

  1. On mesure 𝚫 (différence entre l'épaisseur initiale et l'épaisseur finale) aux deux points d'injection.

    𝚫A correspond à la différence des mesures pour PPD-A (tuberculine aviaire, au point d'injection antérieur)

    𝚫B correspond à la différence des mesures pour PPD-B (tuberculine bovine, au point d'injection postérieur)

  2. On calcule 𝚫B - 𝚫A

  3. On applique la règle de décision :

    • si 𝚫B est inférieur ou égal à 2mm : résultat négatif

    • si 𝚫B est supérieur à 2mm

      • 𝚫B - 𝚫A est inférieur à 1 mm : résultat négatif

      • 𝚫B - 𝚫A est supérieur à 4 mm : résultat positif

      • 𝚫B - 𝚫A est compris entre 1 et 4 mm : résultat douteux

        Valeur de 𝚫B

        Valeur de 𝚫B - 𝚫A

        Résultat

        𝚫B ≤ 2mm

        Négatif

        𝚫B> 2mm

        𝚫B - 𝚫A< 1

        Négatif

        1 ≤ 𝚫B - 𝚫A ≤4

        Douteux

        𝚫B - 𝚫A > 4

        Positif

À l'échelle du troupeau

On prépare un graphique sur lequel tous les animaux du troupeau sont représentés par un point, avec en abscisse 𝚫B et en ordonnée 𝚫A. On trace sur ce graphique les deux droites ΔB – DA > 4 et ΔB – DA < 1 mm.

Ces lignes permettent d'identifier les secteurs où l'on trouvera les animaux sains, douteux ou positifs.

Représentation graphique des résultats d'une IDCInformations[3]

L'analyse de ce graphique permet de distinguer différents cas de figure

Analyse de l'IDC pour un troupeau

Pratique de l'intradermo-tuberculination comparativeInformations[4]
Comparaison IDS/IDC
Caractéristiques respectives des tests IDS et IDC

IDS

IDC

PPD injectées

Injection de PPD-B

Injection de PPD-B et de PPD-A

Objectif

Mise en évidence d'une réponse allergique vis-à-vis des mycobactéries (MTBC et MAC)

Différenciation d'une réponse allergique vis-à-vis de de « M. bovis » « versus » celle vis-à-vis de mycobactéries atypiques

Avantage

- Sensibilité relativement bonne : 76 à 94 %

- Plus simple de réalisation que l'IDC (un seul point d'injection et de lecture)

Spécificité > IDS : 78,8 à 100 %

Inconvénient

Spécificité < IDC (réaction si infection par mycobactéries atypiques : 91,0 à 98 %

- Sensibilité < IDS : 50 %

- Plus contraignant techniquement (deux points d'injection et de lecture)

Indication traditionnelle pour le dépistage

Dépistage en 1ère intention

- Dépistage en 2ème intention (si résultat IDS non négatif)

- Dépistage en 1ère intention si mycobactéries atypiques dans les élevages

Indication actuelle (cf. infra)

Dépistage en 1ère intention en Corse

Dépistage en 1ère intention dans toute la France (sauf Corse et Camargue)

II) Le dosage de l'interféron-γ (test in vitro)

Le test de dosage de l'interféron-γ (test INFγ) est un test « in vitro » alternatif à la tuberculination, qui est basé sur la détection de la réponse immunitaire à médiation cellulaire.

Il consiste à mettre en évidence la production d'interféron par les lymphocytes T d'un animal infecté.

Interferon

Le dosage de l'interféron γInformations[5]
Avantages et inconvénients du dosage de l'interféron-γ par rapport à l'intradermo-tuberculination (IDT)
Avantages et inconvénients du test de dose de l'interféron-γ par rapport à l'IDT

Avantages

- Un seul déplacement du vétérinaire

- Réponse légèrement plus rapide que IDT

- Pas de délai entre deux opérations de dépistage (6 semaines dans le cas de l'IDT)

- Lecture objective (test ELISA)

- Sensibilité : ≈ IDS et > IDC

- Spécificité : > IDS et ≈ IDC

Inconvénients

- Coût unitaire = 50-60 € (IDS = 3-3,50 € et IDC = 7,50-10 €, mais y ajouter le coût du 2ème déplacement du vétérinaire)

- Délai acheminement du sang au laboratoire < 8h avec maintien à 20°C

Diagnostic post-mortem

L'inspection à l'abattoir

Le diagnostic à l'abattoir consiste à rechercher les lésions caractéristiques de la tuberculose telles qu'elles sont décrites ci-avant.

Pratique du diagnostic

L'exercice ci-dessous est une mise en situation d'inspection.

Diagnostic à l'abattoir

Pratique de l'intradermo-tuberculination comparativeInformations[6]

Le constat de départ est que l’apparition de lésions est tardive dans le processus d’infection tuberculeuse. De ce fait, les lésions macroscopiques sont la plupart du temps absentes lors de l’abattage d’animaux pourtant authentiquement infectés ou peuvent être encore très petites si elles sont présentes.

Fondamental

Il en résulte une très faible sensibilité de cette technique d’inspection à l’abattoir.

L’objectif et la démarche ne sont donc pas les mêmes, selon qu’il s’agit :

  • De la recherche systématique de lésions évocatrices de tuberculose sur toutes les carcasses de bovins à l’abattoir. En effet, l’intérêt de cette inspection est que tous les bovins terminent leur vie économique à l’abattoir (ou à l’équarrissage) et sont inspectés (cf.  Lutte, surveillance active de la tuberculose).

  • De l’inspection dans le cadre d’un abattage diagnostique, car dans ce cas :

    • Il s’agit d’une démarche ciblée, qui concerne des bovins déjà désignés comme suspects car réagissant aux tests de dépistage in vivo

    • la recherche des lésions doit être approfondie : inspection soignée de tous les nœuds lymphatiques porte d’entrée

    • même en l’absence de lésions macroscopiques, la réalisation de prélèvements pour le diagnostic de laboratoire est obligatoire.

Examens de laboratoire

Confirmation du diagnostic

Aux analyses anatomo-pathologiques et bactériologiques classiques, se sont ajoutés depuis quelques années les tests PCR, qui non seulement viennent compenser la grande lenteur de l’isolement et de l’identification, mais bénéficient d’une excellente sensibilité et d’une spécificité qui peut l’être aussi, selon les amorces choisies.  

Le tableau ci-dessous compare leurs caractéristiques respectives :

Analyse anatomo-pathologique

Analyse bactériologique

Types de test

Coloration de Ziehl

PCR

Isolement et identification

Recherche de lésions microscopiques (granulomes)

Délai de réponse

≈ 5-7 jours

7-14 jours

1,5-3 mois

Sensibilité

Faible

Elevée

Faible

Spécificité

Faible

Elevée

100%

Principaux atouts

-

Rapidité, sensible, spécifique

Spécificité 100% à confirmation si résultat +

Facteur limitant

Faibles sensibilité et spécificité

Si présence d'inhibiteurs tissulaires de la PCR

Grande lenteur, faible sensibilité

Statut réglementaire de l'animal en fonction du contexte si résultat positif

Dépistage

Diagnostic

Dépistage

Diagnostic

Suspect

Infecté si IDC non négative (même animal)

Suspect

Infecté si :

- PCR MTBC+

- élevage déjà suspect

- élevage susceptibles d'être infecté

- animal avec lésions microscopiques

Fondamental

La PCR représente donc une avancée majeure pour la confirmation du diagnostic de tuberculose.

Typage de la souche

Des techniques de typage moléculaire sont disponibles. Il s’agit du spoligotypage et de la technique MLVA (Multiple Loci VNTR Analysis, VNTR : Variable Number Tandem Repeat) auxquels s’ajoute plus récemment la technique de séquençage à haut-débit (ou NGS : Next Generation Sequencing). Ces techniques sont particulièrement utiles, en soutien aux enquêtes épidémiologiques, pour établir un lien entre les foyers.

FondamentalÀ retenir

Le recours au dépistage est indispensable pour détecter l’infection tuberculeuse, les formes asymptomatiques étant dominantes et pouvant être accompagnées d’une excrétion.

 

Le dépistage ante mortem repose sur la mise en évidence d’une HSR, qui est à la base des tests IDT et des tests INF-γ. Dans le contexte sanitaire français actuel, l’IDC se substitue à l’IDS en 1ère intention, en dépit de son manque de sensibilité, pour mieux contrôler le respect des règles techniques.

 

Le dépistage post mortem réalisé par le biais de l’inspection systématique des carcasses en abattoir (recherche de lésions macroscopiques) vient compléter ce dispositif, tout en étant peu sensible et peu spécifique. Il est également mis en œuvre lorsqu’un abattage diagnostique est prescrit en cas de suspicion établie lors du dépistage ante mortem.

 

La confirmation de la suspicion, que celle-ci ait été apportée ante mortem ou post mortem, nécessite le recours à des techniques de laboratoire, post mortem.