Introduction

La tuberculose est une maladie infectieuse qui affecte l'Homme et de nombreuses espèces animales. Elle présente des éléments cliniques et lésionnels communs à toutes les espèces et peut être occasionnée par diverses espèces bactériennes appartenant au genre « Mycobacterium ».

La tuberculose des mammifères qui seule nous intéressera ici est occasionnée par des espèces appartenant à un complexe appelé MTBC (pour « « Mycobacterium tuberculosis » complex »), qui inclut notamment « M. tuberculosis » (l'agent de la « tuberculose humaine »), « M. bovis » et « M. caprae ».

Dans ce cours, nous nous intéresserons principalement à la tuberculose des bovins causée par « Mycobacterium bovis », car c'est très majoritairement cette espèce qui cause la tuberculose bovine (TBv).

Cette restriction appelle plusieurs commentaires :

  • Il sera donc souvent question de « M. bovis » mais les bovins sont potentiellement sensibles aux autres mycobactéries du MTBC

  • « M. bovis » affecte d'autres mammifères mais ces aspects seront évoqués de façon plus marginale

  • Enfin, la tuberculose à « M. bovis » est une zoonose cliniquement majeure

La TBv est une maladie ubiquitaire. Dans de nombreuses parties du monde, elle sévit de façon enzootique, sauf dans de quelques rares pays qui sont parvenus à l'éliminer totalement de leur territoire.

Méthode

Une maladie difficile à contrôler

La difficulté de ce contrôle est liée à un certain nombre d’éléments. En particulier :

Sur le plan épidémiologique, la transmission est très insidieuse car :

  • L'infection est le plus souvent asymptomatique

  • Il peut y avoir une excrétion en l'absence de signes cliniques

  • La bactérie est très résistante dans le milieu extérieur

  • Outre les bovins, différentes espèces domestiques et sauvages peuvent servir de relais d'infection, voire de réservoirs

Sur le plan des moyens de lutte :

  • Les outils de dépistage et de diagnostic sont imparfaits (problèmes de spécificité liés à des réactions croisées avec d'autres mycobactéries et/ou manque de sensibilité)

  • Aucun vaccin à la fois suffisamment protecteur et n'interférant pas avec le dépistage n'est disponible sur le marché

  • Le traitement des animaux est interdit

Sur le plan de l'acceptabilité par les acteurs :

  • Le fait que la lutte impose des mesures très contraignantes a induit une lassitude des acteurs, particulièrement des éleveurs dans les régions qui restent les plus atteintes.

Méthode

Impact de la tuberculose animale

- Sur le plan socio-économique

L'impact socio-économique de cette maladie est considérable pour un grand nombre d'acteurs, et ce, à différentes échelles, locales, régionales, nationales voire internationales.

Les raisons de l'impact de la tuberculose animale sur le plan socio-économique sont multiples :

  • Circulation à bas bruit d'un élevage à l'autre et d'un pays à l'autre par le biais des animaux asymptomatiques ce qui en fait une maladie difficile à contrôler

  • Impact sur les productions du fait des saisies à l'abattoir et des freins à la commercialisation du lait

  • Lourdeur et coût des mesures de dépistage et de lutte

Les principales conséquences incluent :

  • Un frein aux échanges pour les pays affectés à destination des pays indemnes, concernant les ruminants vivants et certains produits animaux. Ainsi, l'acquisition puis la conservation du statut de pays indemne constitue un enjeu majeur et mobilise des moyens considérables en France (qui est proche du seuil nécessaire au maintien ce statut), , car il permet des allégements des mesures sanitaires lors d'échanges intra-communautaires.

  • Le coût très élevé de la surveillance et des mesures de lutte pour les pouvoirs publics, le plus souvent sur des décennies comme en France, compte tenu de la difficulté à se débarrasser de l'infection pour de multiples raisons. Ainsi, en France, la surveillance et la lutte contre la tuberculose en 2010 et 2011 a été chiffrée à environ 20 millions d'euros dont environ 75 % en assainissement des foyers (indemnisation des éleveurs pour l'abattage de animaux).

  • Les pertes économiques directes imputables aux pertes en viandes (saisies aux abattoirs), en lait (destruction du lait et/ou interdiction du commerce du lait cru et des produits laitiers à base de lait cru). En 1985, le coût de la lutte nationale contre la TBv a été estimé à 34,4 millions d'Euros pour la seule année 1985, alors qu'en 2009, année où la prévalence apparente avait chuté à 0,04 %, la lutte a encore coûté 13,5 millions d'euros.

- Sur le plan zoonotique

La tuberculose à « M. bovis » est une zoonose cliniquement majeure qui est principalement diagnostiquée dans des zones où la TBv est enzootique (5 à 40 % des cas humains de tuberculose, la majorité restant associée à « M. tuberculosis » acquis par transmission respiratoire interhumaine).

La transmission zoonotique de « M. bovis » se fait essentiellement par voie alimentaire, par consommation de lait cru. Une transmission zoonotique par voie respiratoire est également possible, notamment dans un contexte professionnel (éleveur, vétérinaire...), du fait de contacts longs et rapprochés avec des animaux infectés et excréteurs. Des cas de tuberculose cutanée ont aussi été rapportés (chez des chasseurs notamment) du fait de la manipulation de carcasses infectées.

En revanche, dans des pays comme la France où la TBv est très rare et où des mesures de biosécurité sont appliquées vis-à-vis des denrées les plus à risque (lait cru et produits à base de lait cru), l'impact en santé publique de cette maladie est extrêmement réduit (actuellement 1-2 % des cas diagnostiqués en France).

Ce cours étant dédié à la tuberculose animale à « M. bovis », les aspects zoonotiques n’y seront plus abordés.

Méthode

Aspects réglementaires

La catégorisation de la tuberculose animale dans la loi européenne de santé animale (LSA), qui s'applique en France depuis le 21 avril 2021, témoigne de l'importance de cette maladie à l'échelle européenne avec toutefois une modulation selon les espèces concernées (voir tableau).

Espèces

Classe

Mesures principales

Bovidés

B, D, E

Lutte obligatoire en vue de son éradication de l'UE

Artiodactyles autres que bovidés*

D, E

Mesures obligatoires aux échanges et entrée dans l'UE

Autres mammifères terrestres*

E

Mesures de surveillance nécessaires au sein de l'UE

* Mesures différentes (en comparaison aux bovidés) du fait d'une sensibilité moindre de la majorité des autres espèces d'animaux de production et du rôle de réservoir majeur des bovidés.

C'est également une maladie à notifier à l'Organisation Mondiale de la Santé Animale (OMSA).

À retenir

Fondamental

La TBv à « M. bovis » est une maladie cliniquement majeure chez les animaux et transmissible à l'Homme

C'est une maladie très difficile à contrôler, car :

  • l'infection reste très longtemps asymptomatique en règle générale

  • les mycobactéries sont très résistantes dans l'environnement

  • aucun traitement n'est autorisé et aucun vaccin n'est disponible

  • « M. bovis » infecte de nombreuses espèces animales dont des espèces sauvages, apportant un niveau supplémentaire de complexité à la lutte